L’arbitrage, arme fatale du Real

Tous les ans à pareille époque les arbitres se montrent décisifs dans les matchs à élimination directe de la Champions League. Nous le dénonçons, nous listons des faits indiscutables, nous recevons des commentaires sentencieux (respectez les arbitres !) ou méprisants (arrêtez d’accuser les autres bandes de loosers!) et la vie continue jusqu’à la saison suivante.

Compte tenu du faible nombre de matchs concernés (quarts, demies et finale, moins d’une quinzaine en tout) on a l’impression d’événements ponctuels, donc non significatifs. Cette vision de court terme est trompeuse et il faut rassembler nos constats à travers les années pour obtenir une vision cohérente de la réalité. On réalise alors sans ambigüité que c’est chaque année la même chose. Année après année, les mêmes clubs sont favorisés tandis que d’autres sont systématiquement lésés.

Cette récurrence annuelle est tellement indiscutable que je ne pourrais pas aller plus loin sans répéter ce que j’ai déjà écrit il y a un an. Je vous encourage donc fermement à aller lire ce billet, il décrivait déjà en 2017 la réalité de 2018 : dans ces matchs à élimination directe toujours serrés (à partir des quarts de finale), l’arbitre est un facteur essentiel et il peut très facilement faire pencher la balance. Si elle penchait parfois d’un côté parfois de l’autre on pourrait croire à l’effet du hasard. Mais ce n’est pas le cas et on voit au contraire que le Real et le Barça sont toujours favorisés, que la Juve et le Bayern le sont presque toujours (presque seulement car face au Real ils sont défavorisés) et que les clubs français sont toujours lésés.

Dybala tombe dans la surface adverse. Contre Monaco il aurait récolté un pénalty. Contre le Real il a reçu un carton jaune pour simulation. Il a commis une erreur : ne pas tenir compte de l'adversaire.
Dybala tombe dans la surface adverse.
Contre Monaco il aurait récolté un pénalty.
Contre le Real il a reçu un carton jaune pour simulation.
Il a commis une erreur : ne pas tenir compte de l’adversaire.

Cette année les arbitres Pro-Real ont beaucoup profité de la possibilité qu’ils ont de considérer qu’une main est involontaire pour ne pas siffler de pénalty. On se souvient de cette main non sifflée de Sergio Ramos contre le PSG (on s’en souvient … malgré le peu d’écho que la presse a donné à cette nouvelle injustice). De nouveau contre la Juve, Casemiro a touché le ballon de la main dans la surface mais l’arbitre n’a pas sifflé pénalty.

Les commentateurs auraient dû dire : « Eh oui, l’arbitre a choisi, c’est le Real qui va gagner ». Ils ne l’ont pas fait, ils ont invoqué la notion de main involontaire.

Sauf que cette notion de main involontaire n’a pas de sens.

Prenons un exemple simple : je suis le dernier défenseur, devant le but vide. Mes bras sont le long de mon corps. Un attaquant tire au but, mon bras est sur la trajectoire et arrête le ballon, je le dégage et je sauve mon camp. Y-a-t-il main (et donc pénalty) ou main involontaire (et donc pas pénalty) ? A cette question, la réponse évidente est que cela dépend des circonstances.

- Désolé Monsieur Ramos mais il y a pénalty, vous avez fait main. - Mais Monsieur l'arbitre je n'ai pas fait exprès ! - Ah bon ? Alors ok, pas pénalty.
– Désolé Monsieur Ramos mais il y a pénalty, vous avez fait main.
– Mais Monsieur l’arbitre je n’ai pas fait exprès !
– Ah bon ? Alors ok, main involontaire,  pas pénalty.

D’ailleurs la règle précise que pour qu’il y ait faute de main il faut un contact « délibéré » entre le ballon et la main ou le bras. Et elle ajoute qu’il faut prendre en compte « la distance entre l’adversaire et le ballon (effet de surprise) ». Cette notion ouvre la porte au jugement subjectif de l’arbitre et lui permet donc très facilement de sanctionner différemment une action suivant qu’elle est commise par un joueur du Real ou du PSG.

Certes, dans certaines situations il n’aura pas vraiment le choix. Si le tireur est à un mètre et que le tir est violent, la main est involontaire car je n’avais aucun moyen de l’éviter. A l’opposé, pour un tir lointain, si je laisse le ballon toucher mon bras l’arbitre va évidemment siffler pénalty : j’avais le temps d’enlever mon bras, ne pas le faire c’est commettre une main volontaire.

Mais en dehors de ces rares situations caricaturales des milliers des cas vont donner lieu à discussions, avec des joueurs qui diront que la main est involontaire car ils ne pouvaient pas l’enlever et des arbitres qui pourront juger au contraire qu’ils avaient le temps de la retirer. On en arrive donc à la notion de capacité du joueur à éviter la main (l’effet de surprise du règlement) et on tombe dans l’absurde. Si je suis vif et que j’anticipe le tir, je vais retirer mon bras et donc encaisser le but. Si je suis plus lent et moins vigilant je ne vais pas le retirer et donc sauver mon camp.

Je suis puni pour ma vivacité, récompensé pour ma lenteur.

Le bras de Casemiro est nettement décollé du corps. Il augmente sa surface d'intervention par rapport à un joueur qui ferait l'effort de garder les bras dans le dos. Mais c'est un joueur du Real. Donc pas péno.
Le bras de Casemiro est nettement décollé du corps.
Il augmente sa surface d’intervention par rapport à un joueur qui ferait l’effort de garder les bras dans le dos.
Mais c’est un joueur du Real. Donc pas péno.

On pourrait suggérer de rendre la règle plus explicite en parlant non pas de main délibérée mais de main inévitable. Quand Casemiro saute avec les mains écartées du corps, il aurait pu adopter une autre posture qui aurait évité le contact avec le ballon. Il n’a pas fait cet effort et s’en trouve finalement récompensé.

Mais pour que la règle soit encore plus claire il faudrait peut être simplement la rédiger ainsi :  « En cas de main dans la surface il y a pénalty sauf s’il s’agit d’un joueur du Real auquel cas on parle de main involontaire et le jeu continue. Si c’est un joueur du PSG qui commet la faute, en plus du penalty il sera sanctionné d’un carton rouge. »

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